• Galion

Origines de la colonisation (ou comment les français se retrouvent aux Antilles)

L'histoire de Saint-Pierre est étroitement liée à celle de la colonisation de la Martinique, et marque le début de la présence française (terrestre) aux Antilles.

Petit rappel des faits : Le XVIIème siècle est une période agitée en Europe. Anglais, espagnols, français, hollandais, portugais..., ensemble ou l'un contre l'autre, s'entre-déchirent au gré des coalitions. Bientôt, le conflit atteint les Antilles. Français et anglais, en particulier, vont tenter d'affaiblir la puissance espagnole en coupant les routes maritimes vers ses riches possessions d'Amériques.

La découverte du Nouveau Monde ébranle le fragile équilibre européen. L'Espagne et le Portugal s'enrichissent considérablement.

Depuis les découvertes de Christophe Colomb, cela fait plus d'un siècle déjà, qu'Espagne et Portugal se partagent les terres et les richesses du nouveau monde. Des galions chargés d'or et de produits tropicaux font la navette vers les ports de Séville et de Cadix. L'or alimente les caisses du royaume. L'indigo, le bois rouge du Brésil, le sucre, le tabac, ..., s'écoulent facilement auprès de l'aristocratie et de la haute bourgeoisie européennes, et font la fortune des négociants. Cette soudaine richesse des royaumes d'Espagne et du Portugal bouscule l'équilibre géopolitique du continent. D'autant, que français, anglais et hollandais sont exclus de ce juteux trafic. Une bulle papale (le pape n'est autre que l'ancien Cardinal de Barcelone), puis le traité de Tordesillas (1494), leurs interdisent tout commerce avec le nouveau monde.

La révolte gronde dans les ports d'europe du nord. Marins et marchands n'entendent pas rester en retrait

Ce ne sont pas les états d'Europe du nord qui réagiront les premiers, mais leurs sujets. Des ports de Normandie, de Bretagne, d'Angleterre ou de Hollande, des marins, des marchands commencent à organiser des expéditions entièrement financées sur capitaux privés. Leurs objectifs : Prendre part au commerce des produits tropicaux, et à l'occasion s'emparer des galions de la flotte espagnole.

Dés 1520, flibustiers et aventuriers, français pour la plupart, engagent une lutte féroce sur l'atlantique

Les hostilités commencent en 1522. Un flibustier dieppois arraisonne un navire espagnol au large des Acores. A bord, le trésor du roi aztèque Moctezuma, que Cortés destinait à Charles Quint. Le nombre de prises augmente rapidement, et les flibustiers s'enhardissent. Bientôt, ils traversent l'atlantique, envahissent la Mer des Antilles et en plus des bateaux, attaquent directement les colonies espagnoles. En 1537, des équipages français pillent plusieurs villes sur les côtes du Panama et du Honduras. En 1544, d'autres français s'emparent de Carthagène et la restituent après paiement d'une forte rançon. en or et en argent. En 1553, le corsaire Jean le Clerc pille Saint-Domingue puis les îles des Canaries.

Vers 1550, le conflit change de nature. Le royaume de France s'implique directement et se lance dans la conquête terrestre. Une aventure contrariée par le début des guerres de religion

Face aux coups très durs portés à l'économie espagnole, le royaume de France comprend tout le parti qu'il peut tirer d'une intensification des combats en Mer des Antilles. Pour aider ses corsaires, la France cherche désormais à s'implanter aux Amériques. Le but : créer des bases fortifiées capables de servir de point d'attaque ou de repli. C'est ainsi que l'amiral de Coligny envoie une première expédition fonder un fort au Brésil, en 1555 (Cette aventure sert de trame au livre de Christophe Ruffin : Rouge Brésil), puis une autre en Floride en 1562. Mais ces tentatives échouent. Les forces espagnoles anéantissent ces deux embryons de colonie, et le royaume bientôt empêtré dans ses guerres de religion abandonne toute ambition territoriale outre-Atlantique, laissant le champ libre à de nouveaux ennemis de l'Espagne. A cette époque, anglais et hollandais, en conflit avec l'Espagne commencent à s'intéresser fortement à cette partie du monde.

La France éloignée du conflit, les corsaires anglais et hollandais portent le fer sous les tropiques. En moins de 50 ans, ils mettent fin à la domination espagnole sur l'atlantique. L'épisode culmine avec la déstruction

Depuis plusieurs années, les marchands anglais et hollandais tentent de commercer avec les colonies espagnoles d'Amériques. Mais l'Espagne reste intransigeante et interdit tout contact avec eux. Les bateaux surpris à trafiquer sont confisqués, les équipages emprisonnés ou pendus. La reine d'Angleterre s'emporte: "L'usage de la mer et de l'air est commun à tous, et aucun titre quelconque à l'océan ne peut appartenir à aucun peuple...". En sous-main, elle lance ses chiens de mer aux basques de l'espagnol. John Hawkins pille les Antilles en 1565. Deux ans plus tard, le pirate Drake s'empare d'un riche convoi, le trésor des Indes. Désormais, les attaques sont incessantes, et la puissance espagnole sérieusement menacée. En réaction, Philippe II, roi d'Espagne décide... d'envahir Londres. 500 vaisseaux et 100 000 hommes partent vers la Manche. Une "invincible armada" qui pourtant se disloque sous les assauts des corsaires anglais. Les navires épargnés sont drossés à la côte par une violente tempête. L'année 1588 marque la fin de la domination espagnole sur l'atlantique.

Au début du XVIIème, une fois le monopole espagnol sur le nouveau monde brisé, les nations d'Europe du nord se lancent à la conquête des Amériques. La France de Richelieu revient dans la course

En 1606, des colons anglais s'installent en Virginie. En 1623, d'autres débarquent sur l'île de Saint-Christophe et un an plus tard, le Mayflower touche les côtes de Nouvelle-Angleterre. Pendant ce temps, les hollandais mettent pied à la Nouvelle-Amsterdam (New-York) en 1624, ainsi qu'au Surinam en 1630. La France n'est pas en reste. Champlain fonde Québec en 1608, puis le Cardinal de Richelieu accélère le mouvement. Son ambition est double : Lutter contre l'Espagne bien sûr, mais aussi, et surtout développer le commerce extérieur d'une France ruinée par les guerres de religion. Il s'en donne les moyens par la création de puissants groupements de marchands, les Compagnies, et par la constitution d'une flotte de guerre à même de les protéger. En 1626, il initie les conquêtes françaises aux Antilles en créant la Compagnie de Saint-Christophe. Roissey et Belain d'Esnambuc partent avec pour mission de prendre "les îles sises à l'entrée du Pérou".

Carte Saint-Pierre

Saint-Pierre